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FANTOMAS MEDIA
FANTOMAS  MEDIA
29 juillet 2005

Censure.

[...] Si l'on peut, en matiere de censure, craindre le pire, c'est que cet appel a la repression, bien au-dela des cercles ouvertement liberticides, est sous-tendu par une opinion diffuse, une doxa, de plus en plus etendue. L'idee ne cesse de ce propager, notamment, selon laquelle le cinema, ou la litterature, devraient etre edifiants; devraient exclure le mal (et l'on ne craint pas, meme, a ce propos, de confondre allegrement, comme cela se fait si souvent au sujet de Sade, les crimes ecrits, representes, avec les crimes reels); devraient par principe evacuer toute image "degradante" (comme si l'erotisme ne relevait pas fondamentalement de la transgression, du jeu avec l'avilissement, la souillure); devraient, en somme, ne proposer de la realite (sexuelle, mais pas seulement) qu'une version idyllique, harmonieuse, saine, hygienique, reconciliee, positive. Il va de soi qu'avec un tel programme, ce sont des pans entiers de la cinematheque (Stroheim, Bunuel, Visconti, Pasolini, Fassbinder, etc.) ou de la bibliotheque (Sade, Laclos, Baudelaire, Lautreamont, Bataille, Nabokov, Genet, Philip Roth - et meme Rabelais) qui devraient etre expurges. Le plus inquietant, c'est que les tenants d'une telle epuration morale ne semblent meme pas soupconner que ce qui est refoule hors du symbolique finit toujours par faire retour dans le reel - et sous les formes les plus sauvages.

Guy Scarpetta, Variations sur l'erotisme, Descartes & Cie, 2004.

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